Il est 8 h 30, ce 29 juillet 1995, quand un agent du PC de sécurité du Crédit Agricole du Rhône, alerte le commissariat de Thonon-les-Bains : un braquage est en cours dans une agence de la ville ! Il en est certain : il suit le hold-up en direct, grâce au système d'enregistrement qui le relie à toutes les succursales. Il sait qu'il y a deux braqueurs dans la banque ; sans doute, un troisième dehors. Ils sont calmes. Ils ont pris des clients en otages. Des pros ! Les policiers foncent sur place. Un collègue, resté en liaison avec l'agent de sécurité, tente de les prévenir, par radio. Ils sont repérés. Mais il est trop tard ! Un coup de feu crève la vitre de l'agence bancaire. Les policiers ripostent, et reçoivent une rafale d'arme automatique. Au PC de sécurité, l'agent de surveillance n'en croit pas ses oreilles. Il assiste, impuissant, à une véritable scène de guerre. Quand les tirs s'arrêtent, les braqueurs ont pris la fuite. Deux policiers sont blessés. Leur collègue est mort. Il venait d'avoir quarante ans. La PJ prend l'enquête en main. Elle a à faire à des hommes qui avaient bien préparé leur coup. Pour passer par la fenêtre des toilettes, la seule pièce à ne pas disposer de système d'alarme, ils avaient scié ses barreaux, quelques heures plus tôt, et pris soin de replacer la grille en la refixant avec du ruban adhésif du même vert que celui de la banque ! Sur place, les policiers ramassent des douilles en grand nombre et relèvent des traces de sang ; l'un des braqueurs a été blessé. Les témoins ont vu trois ou quatre hommes s'enfuirent à bord d'une Renault 21. Et quand on retrouve la voiture, elle contient encore une perruque, des sandales, des lunettes et l'arme du crime : une Kalachnivov. Il y a aussi un cheveu, sur un appui-tête. Et puis, les policiers disposent d'un élément capital pour confondre, un jour, les hommes qui ont tué l'un de leur confrère : la bande son du hold-up. Beaucoup d'indices, donc. Mais c'est d'un "indic" que va venir la première piste sérieuse. Le coup de Thonon-les-Bains ? C'est "Jésus" qui l'aurait monté, avec un certain "Pierrot". "Jésus", ou Salaün, de son vrai nom, est un homme qui a un casier déjà chargé. Un bagou à la Belmondo, une gueule digne d'un film de Melville, ce "voyou à l'ancienne" est déjà recherché pour un autre braquage dans la Sarthe. La traque commence. Mais quand les enquêteurs mettent enfin la main sur leurs "tueurs de flic", René Salaün, Pierre Pallatin, et Nenad Dzambas, nient farouchement. Et ils ne manquent pas d'arguments : un alibi, une fenêtre trop petite pour leurs épaules, un ADN inconnu, une bande son peu probante... Pour la justice leur compte est bon. Mais des années plus tard, Salaün et les siens crient toujours à l'erreur judiciaire.